Axe 2 – Quel système d’expertise pour une société en transition ?

Le deuxième axe pose la question de l’expertise. Les régimes d’expertise ont évolué au cours de l’histoire, au rythme des changements de la société. Les modalités contemporaines de l’expertise, quant à elles, se déroulent dans un contexte où les débats sur l’épistocratie et la valeur épistémique des savoirs experts refont surface, et où la méfiance des citoyens à l’égard des experts est forte.

Cet axe entend plus précisément porter ses investigations sur le rôle joué et la place tenue par les scientifiques et les experts dans la construction de ce qu’il est devenu désormais commun d’appeler les « transitions ». L’enjeu est de taille car le terme « transition (s) » traverse de nombreux domaines ou champs scientifiques, il est fréquemment utilisé par les acteurs politiques et les médias ne cessent de s’y référer. S’il est bien souvent convoqué à des fins de justification, il n’en demeure pas moins qu’il gagnerait à être interrogé quant aux sens qui lui sont prêtés et aux utilités qui lui sont assignées.

Ce questionnement sera mené à partir des SHS qui contribuent aux travaux de CELEST. Il s’agira de mettre en lumière et d’analyser les usages qui ont été faits de la science et de l’expertise dans l’accompagnement mais aussi, et peut-être surtout, dans la définition des « transitions ». Que celles-ci soient envisagées pour décrire le passé. Ou encore pour penser le présent. Et même l’avenir, notamment afin de guider la construction des politiques publiques.

Pour mener à bien ce projet, des études seront conduites dans des perspectives diachronique et synchronique. Elles seront développées dans les deux WP suivants qui travailleront en synergie :

Le premier volet engagera un travail dans une perspective historique sur l’expertise. Il se concentrera d’abord sur la France, avant d’envisager un point de vue comparatif. L’objectif est de caractériser les éléments structurants des différents régimes d’expertise qui se sont succédés en France depuis le milieu du 19ème siècle, et d’étudier l’articulation entre le pouvoir politique, l’administration et les experts.

Le second volet étudiera les caractéristiques du régime contemporain d’expertise en s’appuyant sur les approches complémentaires de différentes disciplines des sciences humaines et sociales (histoire, droit, sociologie, sciences politiques, philosophie, sciences de l’éducation, économie, psychologie…). Ces analyses permettront de répondre à des questions telles que : Quels défis la popularisation de l’expertise pose-t-elle aux modèles traditionnels de validation des connaissances ? Comment les intérêts des différents groupes sociaux peuvent-ils affecter la place accordée aux recommandations des experts dans l’élaboration des politiques publiques ? Ces intérêts des différents groupes sociaux peuvent-ils être intégrés dans les recommandations des experts ? Comment les experts contribuent-ils à la construction des politiques publiques et quelles sont les limites de leur contribution ?  Quels sont les effets potentiels de la perception de l’expertise par le public sur la légitimité des décisions politiques et sociales ?

Par-delà cette étude relative aux régimes d’expertise passés et actuels, et de leur impact sur la définition des transitions, il s’agira dans le cadre de cet axe 2 de contribuer au développement d’une attitude réflexive de CELEST et de questionner les missions et objectifs qu’il se donne. En quelques mots de travailler à la construction de son identité, de tenter de situer son rôle et sa place dans le contexte actuel de l’expertise sur les transitions, mais aussi de le doter de moyens d’examiner ses propres productions.